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Les stades de maturité lors des phases d’apprentissage


Il m’arrive de penser que les quadrants de maturité face à un nouvel apprentissage sont à la gestion ce que sont les quadrants dentaires à la dentisterie. Ils permettent une analyse plus juste d’une situation.

Autant du point de vue personnel que pour une équipe, il y a quatre phases que nous pouvons vivre avant de parfaitement maîtriser un concept. Ce sont des étapes d’apprentissage normales. Il est possible de ne jamais atteindre les phases supérieures et encore plus fréquemment de ne pas être réellement conscient ni de notre évolution ni de notre stagnation (surtout si l’on demeure au stade 1). Les paliers se divisent ainsi.

Stade de maturité 1
INCOMPÉTENCE INCONSCIENTE: ON NE SAIT PAS QU’ON NE SAIT PAS

Par exemple, avant d’être admis en médecine vétérinaire, vous ne saviez pas qu’extraire une dent à trois racines sur un gros chien pouvait prendre plus de 60 minutes. Actuellement, vous ignorez comment construire un bulldozer. Lorsqu’un nouveau collègue commence à travailler avec vous, il en est souvent à cette étape. Il ne soupçonne pas tout ce qu’il aura à apprendre. Durant cette phase de maturité, nous manquons de recul puisque nous ignorons tout des techniques et connaissances nécessaires pour devenir habiles dans un domaine. Il est donc facile de surestimer nos capacités ou de mal juger celles des autres. En entrevue, par exemple, si vous avez un étudiant en première année de médecine vétérinaire qui vous dit qu’après un quart de travail, il sera en mesure de faire toutes les tâches d’une technicienne expérimentée en prétendant apprendre très vite, c’est un bon indice qu’il en est à ce stade de maturité (il s’agit d’un exemple fictif et exagéré, bien sûr).

Stade de maturité 2
INCOMPÉTENCE CONSCIENTE: ON SAIT QU’ON NE SAIT PAS

C’est une phase difficile… pour l’égo. On prend conscience que c’est plus compliqué que nous le pensions. C’est toutes les premières fois où « ça a donc l’air plus facile dans les livres qu’en vrai ». Certains seront motivés à apprendre et se mettront à l’ouvrage avec ouverture alors que d’autres décideront de nier qu’ils ne sont pas bons et continueront à se donner (et à donner) l’illusion qu’ils savent. Cette phase peut durer plus ou moins longtemps en fonction de la tâche à assimiler, de nos habiletés et de notre capacité à être en conscience de soi.

Stade de maturité 3
COMPÉTENCE CONSCIENTE: ON SAIT QUE L’ON SAIT

Durant cette phase, nous sommes capables de procéder correctement à la tâche de façon autonome. Cependant, il peut encore y avoir des épisodes d’oublis, des plateaux, mais en général, l’amélioration est notable et notre degré de confort aussi. Nous connaissons alors la théorie, les façons de faire, mais ce n’est pas encore automatique ou très aisé. C’est généralement là qu’on se dit: « Je suis capable de le faire, mais je ne peux pas vraiment expliquer comment » ou « J’ai besoin de toute ma concentration ». Nous ne sommes pas au stade d’être apte à enseigner le nouveau processus qu’on continue de perfectionner. Il y a encore des remises en question. C’est pourquoi les compagnons ne prennent pas d’apprentis ou attendent quelques années de pratique avant de pouvoir vraiment accompagner un stagiaire.

Stade de maturité 4
COMPÉTENCE INCONSCIENTE: ON LE SAIT ET ON NE S’EN REND MÊME PLUS COMPTE

Vous le faites, c’est tout. Sans devoir y mettre tous vos efforts. Votre cerveau peut même divaguer un peu par moment en faisant la tâche. C’est le praticien qui détient à son actif 1000 OHE et qui fait des blagues en performant la chirurgie. C’est la technicienne qui se donne un défi en posant un cathéter sur une mini veine et qui réussit l’air de rien. Toutefois, avec le professionnalisme qui sied à notre domaine, cet état ne vous dispense pas de vous garder à jour et de vous inspirer de trucs d’autres experts. Lorsque vous atteignez le stade 4, vous pouvez montrer votre savoir à d’autres à condition de vous souvenir que si c’est facile pour vous maintenant, ça ne l’était pas au début.

Les quadrants de maturité servent autant à s’autoévaluer qu’à évaluer d’autres personnes qu’on désire voir se développer. Avec une bonne conscience du stade, il est plus facile d’ajuster nos formations, de connaître nos besoins et de décider si l’on veut ou non y investir les efforts nécessaires pour évoluer vers le stade supérieur. 

Moi, par exemple, je n’ai aucune envie d’apprendre à construire un bulldozer et j’accepte fort bien d’être S1 dans ce domaine!

Paru dans Le Rapporteur Printemps 2019 de l’Association des médecins vétérinaires du Québec

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